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Thursday 6
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Anne Mercier (Maine Sciences)
› 9:30 - 10:00 (30min)
› Salle de conférences
Une astronomie théorique « par en bas » ? Les auteurs de théories cosmogoniques français entre 1860 et 1920
Volny Fages  1@  
1 : Ecole Normale Supérieure de Cachan  (ENS Cachan)  -  Website
École normale supérieure de Cachan - ENS Cachan
ENS Cachan 61 Avenue du Président Wilson 94230 Cachan -  France

Vidéo de l'intervention accessible sur la plateforme Canal-U

 

Durant le second XIXe siècle, la question de l'origine des astres, la cosmogonie, est l'objet d'un nombre important de publications scientifiques, sous des formes et dans des lieux variés. Alors qu'elle est largement évacuée des pratiques des astronomes professionnels au sein des observatoires, elle est abordée par des auteurs traitant de ces sujets comme un loisir sérieux, en reprenant ici la notion forgée par Robert Stebbins. Ingénieurs des tabacs, des mines, des ponts, officiers militaires, notables de province, développent des théories, et parfois des expériences, cherchant à expliquer la formation du système solaire, des planètes, ou des étoiles. Les pratiques cosmogoniques de ces auteurs se situant en marge de l'élite savante universitaire qui se constitue en France à partir des années 1860, permettent d'esquisser une histoire de l'astronomie « par en bas » renouvelant les études consacrées à l'astronomie amateur du XIXe. En effet, en prenant au sérieux ces pratiques, les logiques qui guident les acteurs, et la présence de leurs travaux dans l'espace public, on peut mettre en lumière l'existence de pratiques marginales dans un domaine souvent présenté comme élitiste par nature. Par opposition à l'observation télescopique ou à la construction d'instruments, supposées plus accessibles aux amateurs, la technicité des savoirs mathématiques considérée, par les tenants de l'autorité épistémique de l'époque et par certains historiens des sciences, comme indispensables à un traitement sérieux de ces questions, discrédite souvent d'emblée ces auteurs et leurs travaux.

Cette intervention se propose de présenter quelques résultats d'un travail de plus grande ampleur sur ces personnages. Après une esquisse du paysage des auteurs de théories cosmogoniques en France entre les années 1860 et 1920, et la présentation d'un ou deux cas centrés sur des parcours biographiques spécifiques, elle pourra évoquer la puissance heuristique de l'utilisation de la notion de boundary-work de Thomas Gieryn pour décrire cet objet. En effet, cet outil analytique permet de mettre l'accent, à travers l'exemple des cosmogonistes, sur un processus de démarcation, particulièrement vif durant la période étudiée, dans lequel une élite savante, par la construction sociale et cognitive de sa crédibilité scientifique, fabrique réciproquement une marge en qualifiant les acteurs s'écartant de certaines normes de « profanes », « amateurs », « marginaux », ou « dilettantes ». Concernant le contenu et la forme des productions savantes, cette distinction intègre également une dimension socio-institutionnelle, s'identifiant en partie au processus de professionnalisation des pratiques de sciences en France dans les observatoires, les universités, et les laboratoires. Le cas des cosmogonistes permet ainsi d'étudier la constitution, à la fin du XIXe siècle, d'un « haut » et d'un « bas » dans le statut socio-épistémique, d'un centre et d'une marge dans la crédibilité scientifique des auteurs de théories astronomiques.



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