L'Histoire naturelle est l'œuvre collective de Buffon, de ses collaborateurs, de voyageurs et de correspondants à titres divers, et l'on ne saurait établir la liste exhaustive de leurs statuts. Elle est aussi l'œuvre de ses propres lecteurs, dont elle recueille la correspondance, et qu'elle rassemble au sein d'une sorte de compagnie de gens de « lettres à Buffon », animés par leur passion pour un animal familier soumis à leur observation. On les voit par exemple accorder à des animaux sauvages une place au sein de leur foyer, de sorte que la sphère privée devient un lieu d'observation du comportement animal. Quelles sont les motivations de ces correspondants ? Quel statut donner à ces témoignages d'amateurs ou de personnes sans statut mais publiés dans une œuvre qui relève de l'institution scientifique ? Faut-il considérer que l'Histoire naturelle confère à ces témoignages une certaine légitimité, ou faut-il considérer qu'ils confèrent à l'Histoire naturelle un caractère mondain ? Nous nous intéresserons notamment à la façon dont Buffon insère ces témoignages au sein de ses volumes, par la citation, la paraphrase, en notes infrapaginales etc., afin de voir si ces éléments d'analyse rédactionnels nous informent sur le statut accordé par Buffon à ces sources. Il s'agira de mieux comprendre le rapport qu'entretient le naturaliste avec ses sources les plus modestes, qui ont souvent été négligées par les critiques qui étaient d'abord soucieux d'analyser les rapports de Buffon avec ses illustres contemporains.
Cette réflexion a été initiée dans notre thèse, et ses premiers résultats ont été publiés dans Buffon et ses lecteurs, Paris, Classiques Garnier, 2011. Nous nous proposons de prolonger notre exploration des volumes du Supplément à l'Histoire naturelle, dont nous n'avons fait jusqu'ici qu'une lecture parcellaire, afin de compléter notre étude ou d'en renouveler la problématique. Ainsi, nous nous intéressons actuellement au témoignage d'un médecin de province concernant une improbable chenille...
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